Songe d'une nuit d'hiver

14 septembre 1888
De plus en plus j’éprouve, sans réprouver, cette sensation d’isolement en société. C’est comme si j’habitais une île déserte au milieu d’un océan humain dans lequel, régulièrement, j’aime plonger puis, après m’y être bien baigné et rafraîchi, je retourne me sécher sur mon îlot à l’ombre d’un palmier (j’ai horreur du soleil). Et même si j’apprécie cette solitude et l’indépendance qu’elle me procure, il arrive qu’elle me pèse … comme ce soir. Mon frère Conrad me manque. Et Olga aussi, ma petite sœur. Comment vas-tu ? Que tu dois toi aussi te sentir bien seule, là- bas en Normandie. Et toi, cher Oncle Adrien, cher Sea Bird, si tu voyais ma vie. Que tu aimerais ! Montmartre, les cabarets, les artistes, cette douce folie que tu apprécies autant que ton bateau. Et ma mère ? Je retourne à mon piano.


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